25 mai — Comme si on s'y était fait



Aujourd'hui est férié, pour célébrer, selon le point de vue, la libération du sud / la fin de l'occupation israëlienne. Dans les bruits de haut-parleurs, les dépêches en cascade, les rumeurs d'attentats à Nabatieh (après les chrétiens d'Achrafieh, les sunnites de Verdun, les druzes du Chouf, les chiites ?) quelques éléments du quotidien.


Comme un avant-goût de l'été, il y a eu trois jours de grande chaleur. Le plafond de notre appartement est aussi le toit-terrasse en ciment, qui continue de diffuser la nuit ; on peine à dormir. Un petit scorpion perturbé est venu mourir au bas de la maison : la propriétaire a fait nettoyer le jardin où s'étaient entassées les vitres soufflées l'été dernier.
Quand il fait chaud, on peut monter à Jezzine... Sur la route, en venant de Saïda, on s'arrête à la station pour prendre l'essence, et une photo d'un panneau peint à la main.


Sur la même route, en montant vers Jezzine, les bâtiments d'une université criblée de balles et de trous d'obus exhibent leurs pièces vides. On doit leur trouver une certaine beauté pour avoir envie de les photographier à la sauvette, sans s'arrêter, comme on le ferait avec des gens. bâtiments de Beyrouth abîmés par la guerre : Mocafico.


Avec les beaux jours il est plus facile de sortir avec Côme. À Nabatieh, on va de temps en temps à "la p'tite fête foraine" connue sous le nom de "Farah", ce qui veut dire "la joie" ou "le sourire" (je crois). Le manège avec les voitures volantes sur vérins a mis du temps à rouvrir, parce qu'il n'avait plus d'ampoules.


La batterie en panne de notre "UPS" nous a obligé à quelques jours sans courant au moment des coupures.
Pierre nous a emmenés "à la rivière" – une belle promenade à Habbouche qu'on lui avait déconseillée après la guerre (parce que le pont avait été bombardé, et qu'on disait qu'il y avait des mines ou des sous-munitions). Les chasseurs y sont revenus, les promeneurs et les troupeaux de chèvres aussi. Pierre y promène son chien... On peut donc a priori y aller. Au milieu des lauriers-roses en fleurs, la rivière est asséchée depuis peu. Dans les trous d'eaux, des milliers de tétards.


D'anciens moulins et pressoirs à olives moulins, des aménagements de canaux (pour détourner une partie de l'eau de la rivière) et d'oliveraies témoignent d'une grande activité autour de la rivière. Plus d'arbres, moins d'humidité... Il y aurait eu des défoliations.


Chaque moulin comporte une grande pièce principale surélevée. J'imagine que les deux trous trous sous l'emplacement réservé à la meule, servaient à évacuer l'huile pour qu'on la récupère au-dessous.




Ici au moins on peut courir. Mais nous ne sommes pas tranquilles pour autant, et Côme doit subir notre surveillance permanente : "laisse-moi tranquille cinq minutes".




On ne pourra pas le laisser jouer dans la terre, avec les cailloux, sans anxiété : au milieu du chemin, Pierre nous signale qu'il a déjà remarqué un truc noir dont il se méfie. Ne pas être absolument certain que c'est un bête morceau de plastique ou de métal, ou un galet poli, ici c'est forcément se dire que ça peut exploser. Dans le doute, on se contente d'une photo.


J'avais envie de donner un coup de pied dedans, ou de jeter de loin un pavé, pour voir (un peu comme on a envie de se pencher malgré le vertige...), juste pour m'amuser de voir que ce n'était qu'un bout de plastique (un élément de chasse d'eau ?)... Qu'est-ce qu'on peut dire à un gosse alors ? Beaucoup de sous-munitions ressemblent à des petites bouteilles (quelques photos ici, prises notamment à Kfar Roummane, ou ici, ou encore ici – photos de victimes – voir aussi la fiche "les principales sous-munitions en circulation" sur le site de Handicap International). Mais d'autres explosifs imitent des petites balles colorées et attirantes, ou des petites cristallisations calcaires...

HI annonce sur son site que
la France recule sur l'interdiction des BASM. On comprend mieux pourquoi si on sait qu'au moins quatre entreprises françaises (GIAT Industries, Thomson Brandt Armements - filiale de Thalès -, Matra BAE Dynamics (MBDA) et Alkan et Cie) fabriquent et commercialisent des systèmes de bombes à sous-munitions.

Commentaires

Anonyme a dit…
merci

on lit gravement - bise aux 3

Posts les plus consultés de ce blog

3 mars — Habbouche – Jezzine - Saïda - Habbouche

18 mars — Une frontière après les cours

11 juillet — Quitter Nabatieh