1er juin — The prison is open (Khiam)



Pour passer de l'autre côté du château de Beaufort, il a fallu montrer patte blanche au check-point, mais l'ami chirurgien qui nous guide (et qui a passé une partie de la dernière guerre a opérer, nuit et jour) se porte garant. Suite aux précédentes visites au Château, mon nom est déjà enregistré. Véro quant à elle passe pour une libanaise.





En allant vers la "porte de Fatima", on est à portée de champ du kibboutz, derrière la frontière d'ici invisible.




Khiam est précisément le village en face de cette frontière. L'endroit est célèbre pour sa prison, transformée en centre de torture, pendant l'occupation du sud par Israël, puis en musée. Mahmoud nous raconte qu'un habitant de Nabatiye y est entré à 15 ans, en est sorti à 30. Qu'il soigne encore régulièrement une femme qui souffre des séquelles de torture.


A l'entrée du village, les photos de martyrs à l'endroit où ils ont été tués ; régulièrement, les trous, rebouchés par la poussière, creusés par les sous-munitions tombées entre les maisons.






La prison, dont les guides touristiques disent qu'elle servait de musée-réquisitoire contre les horreurs de l'occupation, a été complètement bombardée pendant la dernière guerre. Le panneau annonce qu'elle est ouverte quand même. Sur quoi ? En arrière-plan, les montagnes : les fermes de Chebaa.




Tout a été dévasté. À la place des bâtiments, des panneaux avec des photos de la prison avant destruction.





Il reste pourtant un morceau de bâtiment, où on s'efforce d'imaginer les conditions de détention, et c'est peut-être ce que clame l'inscription (traduction bienvenue dans les commentaires) sur la porte d'une cellule.


Du couloir encore debout (mais sans toit) on ne voit qu'un grand champ de ruines.


À la sortie, des éclats d'obus sur lesquels sont inscrits, en jaune et noir, des mentions ironisant sur les Etats-Unis ("Cadeau de l'Amérique au peuple libanais", "Made in USA", etc.).


À l'entrée de ce qui reste de la prison, une construction toute neuve : un réservoir, construits par L'UNICEF.




Lorsqu'on traverse le village de Khiam pour rejoindre Marjayoun, on passe régulièrement sur traces de sous-munitions, au milieu des habitations. Rares sont celles qui ont été épargnées : obus, sous-munitions, éclats... Et pourtant, partout, des échafaudages, des fers à béton, des outils de chantier : une incroyable opinâtreté à reconstruire.




Nous devons nous hâter de rentrer : Mahmoud, appelé pour une fillette renversée, donne des instructions par téléphone, et la promenade se termine sur le parking des urgences. On passe par Marjayoun : des restaurants, des magasins, et devant chaque, des véhicules de l'UNIFIL en stationnement.




Pendant qu'on l'attend chez lui, Côme et son petit copain jouent, avec le château de Beaufort dans le fond.

Commentaires

Anonyme a dit…
Merci pour ce témoignage. Il en faudrait d'autres. Mais qui viendra, maintenant que les télés vous ont présenté le sud comme si c'était un repère de pirates ? Vous avez pu venir et c'est toujours ça contre la terrible désinformation dans cette guerre, y compris entre Libanais. J'espère que ça incitera les gens à aller voir leur propre pays aussi.

Khiam, Qana, Bint Jbeil... On ne peut pas y croire si on n'a pas vu les destructions. Allez voir ! Allez voir avant de parler et de répéter ce que vous disent votre journal préféré ou vos préférences politiques.

Allez voir par exemple les ruines de Bint Jbeil. Oubliez le texte, regardez simplement les photos d'un villageois qui rentre chez lui. Cela suffit pour comprendrez que ce n'est pas sur une armée qu'on a tiré, pas sur une milice, pas sur des terroristes fanatiques, mais sur des villages, sur des gens simples, des chambres d'enfant, des tracteurs, des écoles, des familles... Ils n'y sont pas pour grand chose, sauf qu'ils habitent ici. C'est aussi leur histoire qu'on a bombardé : des maisons anciennes, des oliveraies... Khiam était une partie de l'histoire du Liban, il fallait pour Israël effacer une mémoire, l'éradiquer : il n'y avait rien dans la prison de Khiam qui menaçait Israël, sinon justement qu'Israël avait laissé de sales souvenirs. C'est eux-mêmes qu'ils ont essayé d'effacer. En bombardant ils n'ont fait que se trahir, rendre plus importants encore les moindres petits souvenirs qui deviennent encore plus accusateurs.

Les images de télé de l'été dernier dans les grands médias : des tanks israëliens qui tirent proprement sur une cible calculée par ordinateur... images aériennes soi-disant objectives etc. Tout cela ne vous a pas montré que ce qu'on a détruit, c'est exactement le genre de trucs que vous prenez en photo quand vous faites du tourisme. Vous n'avez pas vu une seule image des enfants tirés en charpie des décombres, et vous ne vous posez même pas la question de savoir pourquoi. Alors que c'est plus de 20% des victimes. Sur 1400 victimes ça fait combien ? Et une fois que ça ne passe plus à la télé...

Ceux qui prennent ces bombes sur la figure, ceux qu'on accuse d'en avoir envoyé sur des civils (alors que les cibles militaires, personne n'en a parlé...), ceux à qui on détruit la maison et le lit, les jardins, ceux qu'on tue toujours après la guerre avec des sous-munitions... La guerre finie, ce n'est pas en Israël qu'on envoie la FINUL, c'est chez eux. Avez-vous vu des libanais envahir le nord d'Israël ? C'est Israël qui s'introduit au Liban, c'est Israël qui détruit tous les ponts, qui bombarde des laiteries, des épiceries, qui détourne des rivières, viole des résolutions de l'ONU sans qu'aucune mesure soit prise, qui dispose de l'arme atomique... mais pourtant c'est le Liban qu'on surveille... Ceux que les avions israëliens survolent trois fois par semaine, ceux dont on a torturé des proches pendant l'occupation, de quoi on les accuse ? De se sentir menacés, de s'armer, de s'organiser et de se déclarer des résistants ? On leur en veut d'avoir la haine ? Ils faudraient juste qu'ils la ferment ? POURQUOI ?

Sortez de votre trou, allez voir, rencontrez les gens d'abord.

Je trouve ça important que sur votre blog on voit que c'est possible de le faire. Allez-y et venez : vous serez accueillis partout.

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